Avec ses platanes et ses toitures en tuiles ocre, le village gardois de Barjac a des allures de carte postale du sud de la France. Depuis 1989, ses 1 600 habitants ont confié les clés de la mairie à Édouard Chaulet. Dès sa prise de fonction, celui-ci a fait de l’alimentation des enfants de sa commune une priorité absolue. « Parce que je suis convaincu que l’estomac et le cerveau sont liés, nous voulons offrir des repas de qualité aux enfants de Barjac », annonce d’emblée cet ancien instituteur.
Municipalisation de la cantine, recrutement d’une diététicienne (devenue première adjointe), professionnalisation des équipes, création d’une cuisine centrale, aménagement d’une salle de restaurant conviviale : l’alimentation à Barjac relève d’une approche holistique presque philosophique. « Je regrette que, dans beaucoup de restaurants collectifs, dans les prisons, les EHPAD, les hôpitaux, on ne pense qu’à nourrir alors que je prône un hédonisme alimentaire », assume Édouard Chaulet, partisan du plaisir des papilles et disciple d’Hippocrate qui faisait rimer aliment et médicament. Ce lien fort entre alimentation et santé, renforcé par les conséquences sanitaires de l’utilisation des pesticides dans la région, est à l’origine du passage au bio amorcé à Barjac au début des années 2000. « C’est une décision avant tout politique qui traduit l’engagement de la municipalité vis-à-vis de l’enfance et de l’école, souligne l’élu. Budgétairement, on a donc fait des arbitrages pour se le permettre. On s’est lancé du haut du tremplin, on a plongé, et maintenant, on nage ! »
Éducation au goût
Avec un budget annuel de 150 000 € environ (pour un budget de fonctionnement de 3 millions d’euros), la cuisine centrale de Barjac produit 240 repas par jour, principalement pour les écoliers, mais aussi pour les résidents de l’EHPAD. Subventionnés à plus des deux tiers, les repas scolaires sont facturés 2,50 € par enfant, le troisième d’une même fratrie ne payant pas son repas. BARJAC 1 600 habitants Département : Gard Région : Occitanie Ça se passe à… Éducation au goût, lutte contre le gaspillage, soutien à une agriculture traditionnelle et de proximité, formation des personnels de la cantine : « La question de l’alimentation est au cœur d’un paradigme global, qui fait sens, justifie Édouard Chaulet. On est au carrefour de questions éthiques, économiques et environnementales. » Un paradigme qui fait sens, mais qui se heurte encore à plusieurs types de difficultés, qu’il s’agisse de l’approvisionnement en produits bios ou de la bataille qu’il faut encore et toujours mener pour convaincre de la légitimité du bien-manger. « Il reste tant de familles “ignorantes” des méfaits du sucre et de la nécessité de bien-manger, déplore Édouard Chaulet. C’est un problème d’éducation qu’il faut prendre à bras le corps. J’imagine parfois des ateliers pour que nos cuisiniers apprennent aux parents comment cuisiner la protéine végétale. » Un nouveau défi à relever.