C’est une décision sans appel. La communauté de communes Pays Bigouden Sud (Finistère) l’a annoncé en décembre 2024 : sept maisons en danger de submersion vont être rachetées à leurs propriétaires au prix du marché et démolies. Ces habitations sont situées juste à l’arrière des dunes du front de mer, dans le quartier de Léhan, sur la commune de Tréffiagat. Rien ne semble en effet pouvoir arrêter l’érosion du remblai qui protège cette zone urbanisée et, selon les déclarations du président de la communauté de communes, Stéphane Le Doarré, faites fin décembre aux médias locaux, « le jour où il y a une brèche dans la dune, l’eau de mer peut monter. Selon des modélisations 3D, tout serait inondé en 10 minutes. Quand la brèche est faite, on ne peut rien faire, l’eau envahit tout. »
Les alertes se multiplient
Depuis des années, la collectivité cherche par tous les moyens à enrayer le phénomène en réalisant des travaux d’enrochement du pied du remblai de protection, en déversant de grandes quantités de sable, en plantant des pieux de bois… En pure perte. Le littoral recule sous les assauts du vent et des vagues, des forts coefficients de marée et des épisodes extrêmes et les alertes rouges se multiplient. En 2023, lors du passage de la tempête Ciarán une vingtaine de maisons avaient été évacuées. Ces derniers mois, l’érosion semble s’être accélérée et, durant le seul week-end des 14 et 15 novembre, le trait de côte a reculé de 1,5 mètre. Des travaux ont de nouveau été réalisés pour parer au plus pressé, mais la solution ne peut être que transitoire.
Au prix du marché
Face au danger, la communauté de communes réalise une première en France : l’achat puis la démolition à titre préventif de sept maisons situées en première ligne. Trois millions d’euros ont été déboursés pour les acquérir. Si la décision est déchirante pour les habitants, elle comporte quelques avantages. En premier lieu, elle doit permettre d’éviter un drame comparable à celui de La Faute-sur-Mer. Lors de la tempête Xynthia en 2010, la commune vendéenne avait été noyée sous les eaux après la rupture de la digue à la mer, causant 29 décès. Deuxième élément intéressant : le rachat au prix du marché permet aux familles d’acquérir une autre résidence. Enfin, l’anticipation évite par définition la précipitation. Les habitants disposent de temps pour se reloger et les pouvoirs publics peuvent conduire la concertation sans pression du danger imminent. Reste que la décision est inéluctable… comme le danger : pour les élus, la question n’est plus de savoir si la mer passera la dune, mais plutôt quand. De fait, d’autres maisons du secteur pourraient être concernées à terme.
© Emilie Corcuff