Ici une piscine municipale, là une école, ailleurs un collège, un bâtiment administratif ou une mairie d’arrondissement… Depuis 2019, la ville de Paris s’est lancée dans une expérimentation qui a fait ses preuves depuis : chauffer ou rafraîchir, selon la saison, des bâtiments publics grâce aux calories puisées dans les eaux usées circulant dans les égouts. La température de l’eau ne descend pas en dessous de 13 °C et ne monte pas au-dessus de 20 °C, s’avérant toujours plus chaude en hiver et plus froide en été que la température extérieure moyenne. Des plaques métalliques fixées sur les parois des égouts, dans les endroits où la canalisation présente des lignes droites, font office d’échangeur thermique.
60 % des besoins
À l’intérieur des plaques se trouve un réseau d’eau qui récupère les calories et alimente une pompe à chaleur raccordée par un microréseau aux bâtiments proches. Pour Paris, dont le troisième Plan climat air énergie territorial, lancé en 2018, prévoit d’atteindre la neutralité carbone en 2050, le potentiel que représentent les 2 600 kilomètres d’égouts n’est pas à négliger. Suez, qui conduit les opérations de cette entreprise de rénovation énergétique, estime qu’à terme les égouts fourniront à eux seuls 60 % des besoins énergétiques nécessaires au chauffage et au rafraîchissement des bâtiments publics. D’autres villes en France comme Bordeaux ou Levallois-Perret utilisent déjà le même procédé.
De son côté, la ville de Port-de-Bouc, dans les Bouches-du-Rhône, mise sur l’eau de mer. Elle a lancé en décembre Seanergies, un programme de rénovation énergétique qui comprend l’alimentation de la ville en eau chaude ou froide, basée sur la thalassothermie. Le projet de 17 millions d’euros, conduit par Engie Solutions, consiste à récupérer les calories marines pour alimenter un réseau de chaleur. Le dispositif sera installé sur les bords du canal de Caronte qui relie l’étang de Berre à la Méditerranée. En parallèle, le projet prévoit la création d’un autre réseau, de froid celui-ci, qui permettra d’alimenter des îlots de fraîcheur sur la commune qui compte 17 000 habitants, en ciblant prioritairement les bâtiments publics.
Stabiliser les prix
Dans le cadre du plan de rénovation, 19 bâtiments communaux seront équipés en toiture de panneaux photovoltaïques produisant l’équivalent de la consommation électrique de 878 foyers. Un troisième réseau va être aménagé pour récupérer l’eau brute (100 000 mètres cubes à terme) qui sera utilisée pour l’arrosage à la place de l’eau potable. Pour Laurent Belsola, le maire de la commune, la mise en œuvre de ce dispositif en quatre volets, annoncée pour la rentrée 2026, va contribuer à la stabilisation du prix de l’énergie et à l’économie de la ressource en eau potable. Seanergies a été constitué sous la forme d’une SEMOP et ambitionne de porter le taux des EnR dans la consommation énergétique de la commune à 67,5 %. Le maire met aussi en avant l’impact sur l’emploi des chantiers dans cette ville où le taux de chômage frise les 20 %.