La gratuité des transports publics séduit un nombre croissant de collectivités et s’est imposée depuis les années 2010 comme un thème important du débat public. Elle suscite des avis tranchés à l’intérieur même des forces politiques. Une quarantaine de villes ou agglomérations, de droite comme de gauche, ont à ce jour opté pour la gratuité totale pour tous les habitants, et parfois même pour les visiteurs. D’autres s’en tiennent à des formes de gratuité partielle (soit pour des publics ciblés, soit le week-end ou à certains horaires ou encore sur certains trajets), qui se révèlent souvent une étape vers la gratuité totale. Sans compter les communes touristiques comme les stations de ski qui s’y sont converties depuis longtemps avec leurs navettes. Touchant initialement les villes de moins de 50 000 habitants, la gratuité a gagné depuis une quinzaine d’années des villes de plus de 100 000 habitants comme Aubagne, Dunkerque, Niort ou Calais. Ou parmi les nouvelles venues, l’agglomération de Bourges et trois communes associées (soit 20 communes, et quelque 110 000 habitants) depuis le 1er septembre.
Quant à la métropole de Montpellier (450 000 habitants), elle rejoindra le mouvement le 21 décembre 2023, après avoir expérimenté des systèmes de gratuité partielle, devenant le plus grand territoire d’Europe à faire le choix de la gratuité totale, après Tallinn en Estonie (410 000 habitants).
ENJEUX SOCIAUX ET ÉCOLOGIQUES
Pourquoi instaurer cette gratuité ? À Bourges, on évoque un coup de pouce au pouvoir d’achat (une famille pourrait économiser jusqu’à 300 euros par an) et à l’écologie. La gratuité serait perçue par ses partisans comme un moyen de répondre à des enjeux sociaux, en facilitant l’accès aux transports des plus précaires, des jeunes, des personnes âgées… et à des enjeux écologiques, en faisant préférer le transport collectif à la voiture individuelle, diminuant ainsi les émissions de gaz à effet de serre. Tout en contribuant au rééquilibrage urbain par le désenclavement de certains quartiers ou la redynamisation des centres-villes1.
Sur le plan social, la gratuité universelle plutôt que ciblée sur certains groupes (bas revenus, jeunes, retraités…) permet de régler le problème du non-recours aux droits qui touche jusqu’à 70 % des potentiels bénéficiaires, mal informés ou rebutés par les démarches à accomplir. Et ce sans surcoût puisque cela supprime les coûts de billetterie, de contrôle et d’accompagnement des publics visés. Ce fut l’une des motivations de Dunkerque et de Montpellier, où le taux de non-recours atteignait 40 % des ayants droit.