BRUNO DELSALLE
General manager de l’Association Internationale Villes et Ports (AIVP)
— La mission première de l’AIVP (Association Internationale Villes et Ports) est d’améliorer la relation entre les villes et les ports. Cette relation ne va pas de soi ?
Bruno Delsalle : Elle n’a pas toujours été naturelle. S’il y a aujourd’hui une fierté à être une ville portuaire, maritime ou fluviale, cela n’a pas toujours été le cas. À la fin des années 1980, les ports, qu’on appelait alors ports autonomes, étaient perçus comme des outils techniques, destinés à développer des terminaux et des industries au bord de l’eau, de façon indépendante des enjeux urbains.
L’augmentation du nombre et de la taille des navires et l’étalement des ports qui en a découlé ont entraîné des reconfigurations et l’émergence de friches portuaires. À cette époque, différents projets de réhabilitation, de Londres à San Francisco, ont suscité beaucoup d’interrogations, qui sont à l’origine de la naissance de l’AIVP. En 1988, Antoine Rufenacht, qui n’est pas encore maire du Havre, organise le premier Forum Villes et Ports pour réfléchir collectivement sur le devenir des friches portuaires. Français, Canadiens, Italiens, Espagnols… que la privatisation des bords de la Tamise rend dubitatifs, échangent alors sur la place du service public dans le réaménagement des friches portuaires. Trente-cinq ans plus tard, l’AIVP appréhende plus largement la relation ville-port, dans toutes ses dimensions.
— Parmi les défis à relever, celui du gigantisme du trafic maritime et fluvial. Est-ce une chance ou une contrainte pour les villes portuaires ?
B.D. : L’explosion de la mondialisation s’est accompagnée d’un gigantisme naval qui n’existait pas avant : dans les années 1990, un porte-conteneurs de 8 000 boîtes était considéré comme un géant ; ceux d’aujourd’hui en comptent 24 000 !