Gilles Leproust est maire (PCF) d’Allonnes (Sarthe) depuis 2008, conseiller départemental depuis 2011 et viceprésident de Le Mans Métropole en charge de la politique de la ville. Il est président de l’association Ville & Banlieue depuis juin 2022. Il est également vice-président de l’Association des maires de France (AMF) et membre du Conseil national des villes (CNV) depuis 2019.
— En tant que maire et président de l’association Ville & Banlieue, vous avez été très sollicité par la presse à l’occasion des émeutes de juin, chacun cherchant des explications à ce qu’il s’est passé. Quelle est votre analyse ?
Gilles Leproust : Ce qu’il s’est passé à travers la mort de Nahel, avec les images terribles que nous avons tous vues, a été le déclencheur de braises qui couvaient. Et aujourd’hui, à cette rentrée, les braises sont toujours là. Nous avions écrit une lettre ouverte au président de la République en avril pour l’alerter. De par nos expériences de terrain, on sentait qu’il y avait de la colère, une colère liée à cette crise sociale forte. Beaucoup de femmes et d’hommes ne se sentent plus appartenir à notre République, y compris une partie des jeunes et des ados qui voient leurs parents galérer et ne se sentent pas respectés. Tout ça, c’est un cocktail détonnant. C’est très profond. Il y a aussi une partie de la population qui n’a pas participé aux émeutes mais qui avait une certaine sympathie avec leur colère — je n’ai pas dit avec leurs actes… Et puis ça a généré, ça génère encore, de la peur, mais qui s’exprime peu, en fin de compte. C’est une des difficultés, aujourd’hui : on a besoin de trouver des espaces d’expression pour que parlent celles et ceux qui ont subi directement et indirectement ces émeutes, mais aussi pour que parlent les personnes qui ont commis ces actes.
— Comment fait-on pour s’en sortir ? On a vu que tous n’étaient pas d’accord à gauche. Est-ce qu’à ce moment-là, il fallait appeler au calme ?
G.L. : On était beaucoup sur le terrain. On a rencontré les gens qui étaient victimes de dégradations, on a fait passer des messages. Il y a eu des citoyens, y compris des jeunes, qui ont eu un rôle et des interventions très positives de ce point de vue là. Donc oui, on était dans cette démarche d’appel au calme, mais comme on le fait tout le temps. En tant que maire, en banlieue, on a souvent l’impression d’être un Casque bleu qui doit trouver, entre des positions diamétralement opposées, un peu de sérénité pour permettre le « vivre » et surtout le « faire ensemble ».