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— Quelle est votre motivation, au COL, pour produire de l’habitat participatif ?
Imed Robbana : Nous ne voulons pas produire des logements de façon industrielle comme des yaourts, mais créer de vrais lieux de vie ; nous ne voulons pas faire entrer les gens dans des cases, en leur proposant à tous le même T2, mais adapter les cases aux gens. C’est pour cela que les projets d’habitat participatif sont complexes. Mais nous avons la conviction que ça vaut le coup pour recréer des solidarités, ce qui est indispensable dans le monde de brutes dans lequel nous vivons. Nous avons pour objectif de faire de l’habitat participatif pour tous, et non pas réservé aux bobos, avec une vraie mixité à la fois des revenus et socioculturelle. On fait souvent de l’habitat participatif quelque chose d’alternatif ; nous, nous en faisons un modèle d’avenir, qui doit sortir de la confidentialité.
« J’explique aux maires que ce sont des projets réversibles, qui peuvent redevenir une résidence classique. Mais, surtout, j’essaie de les convaincre que ça peut marcher ! »
— Concrètement comment intervenez-vous ?
I.R. : Nous faisons avec les gens, en leur faisant comprendre qu’ensemble on est moins seul, plus fort et plus intelligent. Pour expliquer le processus, je prends souvent l’image d’un train : après avoir trouvé un terrain, nous organisons une grande réunion en gare de départ pour expliquer le projet, les principes de l’habitat participatif, les prix de vente prévisionnels. Puis le train démarre, et on commence les réunions de programmation sur les espaces partagés tous les quinze jours. Entre l’acquisition du terrain, le permis de construire, le travail participatif, le chantier, etc., il faut compter trois ans et demi en moyenne, soit six mois de plus que pour une opération classique. Ceux qui montent en gare de départ doivent être motivés et capables de se projeter sur trois ans et demi. C’est le cas de beaucoup de personnes âgées ou de personnes seules avec des enfants. Certaines descendent du train en cours de route, d’autres y montent, ce qui génère une complexité supplémentaire pour que le train arrive à l’heure, plein de surcroît, pour garantir la viabilité économique de l’opération.
— Comment plaidez-vous la cause de ces projets auprès des élus locaux ?
I.R. : J’essaie d’abord d’expliquer aux maires que ce sont des projets réversibles, qui peuvent redevenir une résidence classique. Mais surtout, j’essaie de les convaincre que ça peut marcher, que ça peut être une belle aventure, même si ce n’est pas toujours le monde des bisounours. Enfin, il y a une valeur ajoutée à l’échelle du quartier, voire d’un village. Le processus participatif contribue à l’acceptabilité d’un projet immobilier. Prenons l’exemple du projet qui nous a permis d’être retenus pour la création d’une soixantaine de logements dans le quartier de Lapujade, à Toulouse : nous l’avons imaginé avec des acteurs de l’économie sociale et solidaire et du monde de la culture, dans l’idée de créer des interactions avec le quartier, sans forcément tout raser. En faisant de la participation, à l’échelle d’un quartier, on renforce ou on fait naître des lieux de vie, on tient compte du voisinage, on recrée un écosystème qui peut améliorer le vivre ensemble sur le long terme.