Par Jacqueline VIRUEGA
Le mot « vigilance », un mantra pour les élus ? La vie d’une collectivité est riche de dangers, notamment dans les relations avec les entreprises prestataires et les associations. Si les marchés publics sont clairement cadrés par la loi et les procédures, d’autres situations exigent également la plus grande prudence. Par exemple pour les élus qui, en amont ou en parallèle de leur mandat, mènent des activités d’entrepreneurs, de présidents de club sportif, de membres de la Chambre de commerce, etc. Ils doivent éviter « toute situation d’interférence entre un intérêt public et des intérêts publics ou privés qui est de nature à influencer ou à paraître influencer l’exercice indépendant, impartial et objectif d’une fonction ». Et ce, « indépendamment d’un quelconque gain ou avantage personnel et indépendamment de tout préjudice », comme le rappelle La Gazette des Communes du 22 février 2023.
« NE DÉCIDEZ JAMAIS SEUL ! »
Comment se préserver dans un quotidien rythmé par mille obligations ? Assez simplement pour Jean-Louis Cazaubon, maire depuis 1995 de Poueyferré, commune rurale des Hautes-Pyrénées et vice-président de la région Occitanie : « Si les travaux dont la commune a besoin se situent sous le seuil d’un marché public, nous demandons un devis à trois prestataires. Une commission de quelques élus choisit une entreprise, mais le conseil municipal doit valider cette option. Les concurrents disposent du même cahier des charges rédigé par les élus, au besoin avec l’aide de l’ADAC 65. La moins disante ou la mieux disante sera choisie, collectivement, et la dépense sera contrôlée a posteriori par les services de l’État. Le maire ne décide jamais seul ! » Et les cadeaux ? « Les entreprises n’envoient plus de cadeaux comme autrefois. Ce ne sont pas forcément les opposants politiques qui s’en servent contre vous. La vox populi peut vite vous mettre à l’index. Donc, pas de cadeau ! » Un témoignage qui illustre au mieux l’article L. 1111-1-1 du Code général des collectivités territoriales et sa Charte de l’élu local : « L’élu local poursuit le seul intérêt général, à l’exclusion de tout intérêt qui lui soit personnel, directement ou indirectement, ou de tout autre intérêt particulier. »
L’élu poursuit le seul intérêt général à l’exclusion de tout intérêt qui lui soit personnel ou de tout intérêt particulier
FORMER ET GUIDER
Cette attitude, le maire doit l’exiger de l’administration qu’il pilote. Le Code général de la fonction publique impose une obligation d’intégrité et de probité aux agents publics (article L121-1). À défaut, ils risquent une sanction disciplinaire, voire pénale. Pour s’en prémunir, ils ont à leur disposition le guide que l’Agence française anticorruption (AFA) a publié à leur attention. Ces recommandations (lire ci-contre) s’adressent cependant à un public bien plus large, entreprises, administrations de l’État, collectivités territoriales, etc. L’AFA leur indique les moyens de prévenir et détecter les faits de corruption, grâce à des dispositifs éprouvés, fondés sur l’engagement de l’instance dirigeante, sur une cartographie des risques et sur la gestion de ces risques. De précieux outils pour gérer sans stress des situations désormais complexes.
Rappelons toutefois que l’immense majorité des élus ne compte pas son temps et paie souvent le prix de son engagement. Une fois les précautions nécessaires prises, il faut veiller à ne pas enfermer l’élu dans sa tour d’ivoire en se coupant de l’échange direct avec les entreprises et les forces vives de son territoire. Au contraire, le dialogue, la présentation de projets de développement ou d’innovations peuvent nourrir la réflexion partagée et la décision… collective !