Dossier réalisé par Marie-Pierre VIEU-MARTIN
AU SOMMAIRE DE CE DOSSIER
-
Crise climatique : les villes font partie de la solution (ci-dessous)
-
Morgane Colombert : « Passer de la connaissance à l’action »
-
Dunkerque explore la voie d’une réindustrialisation verte
-
Strasbourg expérimente l’école sans voiture
-
Marseille choisit la sobriété et l’eau
-
Est-Ensemble milite pour le vélo et la résilience
-
Pays-Basque : la paille au service du bâtiment !
-
Vitry-le-François fait sa révolution biomasse
-
Lorient fait passer ses transports au vert
-
Faibles émissions, grosse colère ?
La France a connu le mois d’octobre le plus chaud depuis 1900, avec des températures dépassant les 30 °C degrés en journée, et flirtant avec les 20 °C pendant la nuit. Le climatologue Olivier Cassou parle d’une perspective de réchauffement « aux effets encore difficilement imaginables ». L’été 2022 en a montré les prémices. En août, 100 communes étaient privées d’eau potable, confrontées à la sécheresse, tandis qu’en Corse, à Paris, Lyon, Marseille ou Saint-Étienne, les populations se retrouvaient, à la suite à de violents orages, les témoins impuissants de rivières dévalant les rues…
Les collectivités peuvent encore agir
Si la définition des orientations pour le climat reste du domaine de l’État, comme c’est le cas pour l’air et l’énergie, les conséquences quasi quotidiennes du réchauffement climatique sur les territoires conduisent de plus en plus de communes et d’établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à engager leurs propres plans climat. D’autant qu’ils ont la possibilité d’agir et d’instaurer des modes de vie et de développement plus sobres en carbone. Parmi les leviers à leur disposition pour réduire les émissions de CO2, ils peuvent user de leurs compétences en matière d’urbanisme et d’aménagement du territoire, que ce soit en matière de construction, de rénovation des bâtiments publics ou de transition énergétique. Les villes et surtout les intercommunalités ont encore les moyens d’impulser des mobilités plus douces favorisant les transports en commun, le vélo et la marche. Agir sur ces politiques n’a rien d’anodin : l’automobile et le chauffage, au gaz et au fioul, représentent les deux secteurs où l’empreinte carbone est la plus forte. Les collectivités peuvent aussi intervenir sur d’autres terrains : par exemple, pour faire évoluer l’alimentation en réduisant la consommation en viande, ou pour œuvrer à la relocalisation de l’agriculture et au développement des circuits courts, ou encore pour « verdir » la commande publique en instaurant « une clause de mieux-disant écologique » au même titre qu’un mieux-disant social dans les appels d’offres locaux.
Un État trop descendant
Dans le prolongement de la Convention citoyenne pour le climat, la loi Climat et résilience (août 2021) a affiché la volonté de doter les territoires d’outils supplémentaires pour mener à bien la lutte contre le réchauffement climatique. Dans ses mesures les plus emblématiques, on trouve la généralisation des zones à faibles émissions mobilité (ZFE-m) pour les agglomérations métropolitaines de plus de 150 000 habitants, la massification des rénovations de logements et l’objectif de « zéro artificialisation nette des sols à l’horizon 2050 ». Si personne n’a contesté ces objectifs, des réserves ont été apportées quant aux modalités et moyens réels de leur mise en œuvre. Relayant le sentiment des élus locaux, l’Association des maires de France (AMF) a évoqué un texte « descendant » prenant mal en compte les spécificités territoriales, comme cela a été le cas avec la décentralisation de la compétence de régulation des publicités aux maires, sans outils d’ingénierie et sans financements adaptés. La loi 3DS de janvier 2022 permet pour partie de corriger le tir en proposant une nouvelle étape de la décentralisation pour des territoires « plus dynamiques et agiles » particulièrement face au défi de l’écologie. Le texte prend acte d’une plus grande territorialisation des besoins, notamment sur la coordination de la transition énergétique. Mais la marge de manœuvre donnée aux élus locaux par rapport à l’État et aux préfets reste cependant l’objet de questionnements… et parfois de différends. En atteste le vote du Sénat du 4 novembre dernier, qui refuse d’accorder aux maires le droit de veto qu’ils réclamaient sur l’implantation de projets d’énergie renouvelable dans leur territoire.
1. Olivier Cassou, chercheur au CNRS et coauteur du 6e rapport du GIEC.
2. Loi relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l’action publique locale.
Le GIEC évalue l’impact du changement climatique sur les villes
Les citadins sont 4,2 milliards à l’échelle mondiale. Ils sont les premiers menacés par le réchauffement, ainsi que les immeubles et les infrastructures. D’ici à 2050, la population urbaine devrait croître de 2,5 milliards, en particulier dans des zones particulièrement exposées au changement climatique. Les principales menaces sont le « stress de chaleur » pour l’organisme, les inondations ainsi que les conséquences des catastrophes climatiques pouvant impacter l’approvisionnement en nourriture, en eau ou autres ressources essentielles. Avec 2 °C d’augmentation moyenne des températures, les dégâts causés aux infrastructures pourraient coûter 4,2 milliards de dollars d’ici à 2100.